« Daily routine »
J’ai commencé ce projet un certain 24 septembre 2016, à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, en prenant une photo dans des WC bleu et blanc. Je ne sais pas très bien pourquoi, pourquoi ce lieu, pourquoi ce jour-là… mais je me suis dit que ça pouvait être intéressant d’essayer de faire une image chaque jour. J’étais loin de me douter d’une part que j’allais m’y tenir, d’autre part que j’allais suivre ce projet sur 3 ans, soit 1096 images.
Une visite touristique à Albi le lendemain, le vêtement fleuri d’une collègue le surlendemain, unebanquette de brasserie ensuite… j’avais le début d’une série, variée, pour raconter mon « quotidien ». Car en définitive, à travers des sujets, des lieux, des ambiances assez éclectiques, le dénominateur commun, c’est moi, derrière l’appareil photo.Il existe de nombreux projets autour de l’idée d’une photo par jour : une photo d’un même endroit chaque jour, un (auto)portrait quotidien, des chroniques de rue… ; ici l’unité du projet repose sur ce que mon œil voit.
Et cet œil avait besoin d’être sollicité à cette période-là. J’avais un peu perdule goût de photographier et j’avais le sentiment de tourner en rond dans ma pratique habituelle, la photo de rue. J’ai donc vu le début de ce qui n’était pas encore un projet bien défini comme une opportunité de refaire de la photo, une manière d’exercer mon œil et de le maintenir ouvert à l’observation.
Ce n’est pas une quête artistique : les images ne sont pas forcément belles et n’ont pas cette prétention, l’intention n’est pas esthétique. Ce n’est pas un récit strictement autobiographique, auto-centré (ou alors un autoportrait qui n’en est pas un). Ce n’est pas non plus un travail documentaire. Peut-être un peu tout cela à la fois. Il n y a pas de messageparticulier délivré en substance. Il s’agit plutôt de retranscrire ce que mon œil voit, observe, capte au fil de mes journées. Celles-ci peuvent être monotones et se résumer à un aller-retour entre le domicile et le travail. Parfois la journée est plus riche, ponctuée d’un moment en famille, entre amis, d’un trajet, d’une balade, d’un voyage, d’un séjour à l’étranger. Parfois c’est l’imprévu, au coin de la rue, qui bouscule la routine et crée la photo... C’est raconter la « banalité » du quotidien (en l’occurrence le mien) à travers des images parfois quelconques, parfois moins, parfois drôles, absurdes, surréalistes ou au contraire très réalistes, qui ont une résonnance pour moi et de temps en temps plus largement, offrant la possibilité au lecteur de s’identifier ou de faire parler son imagination.
C’est un exercice aussi, un challenge : arriver à produire au moins une image par jour, si possible assez évocatrice et pourquoi pas esthétique, y compris les jours où justement il ne se passe rien ou en tout cas pas grand-chose. Parfois j’ai plusieurs images intéressantes pour une journée et je dois faire un choix, parfois la journée s’achève et aucune inspiration ne m’est encore venue : à journées différentes, situations différentes.
Ce projet s’achève le 23 septembre 2019, au terme de 3 ans d’images quotidiennes. 3, c’est un bon chiffre, ça sonne comme les trilogies au cinéma. Ça ne m’empêchera pas de continuer à faire des photos n’importe quand, n’importe où, mais j’ai le sentiment d’être arrivé au bout de quelque chose et c’est par ailleurs intéressant de voir un projet abouti, de lui donner un début et une fin. A présent il peut être temps de le faire vivre, le diffuser et d’envisager de nouveaux projets.